The Lesser Blessed, Richard Van Camp



Planté dans les Territoires du Nord-Ouest du Canada, Fort Simmer est un bled perdu où vivent des communautés amérindiennes miséreuses, gangrenées par l’alcoolisme, le chômage, le désœuvrement, la drogue, et la violence qui en résulte.

Pour Larry, de la tribu des Dogribs, la rentrée scolaire qui approche annonce la reprise des brimades, des quolibets... et des coups. Aussi baraqué qu’un spaghetto, le garçon de 16 ans ne s'intéresse pas au sport. Gardant à l’esprit l’image de sa mère alcoolique, sobre depuis peu, il refuse de participer aux bitures générales. Autant de « tares » aux yeux des garçons de son âge, qui font de lui la cible préférée des amateurs de castagne.
Restant prudemment à l’écart, il n’a d’yeux que pour Juliet (au nom de famille évocateur : Hope), la bombasse du lycée, qui s’amuse gentiment à le balader, elle qui pourtant, si on en croit la rumeur, n'est pas farouche et a la cuisse plutôt légère.

Un jour qu’il se fait rouer de coups, un grand balèze vient à sa rescousse. Johnny est un beau gosse métis dont le charisme et l’assurance font craquer toutes les filles du lycée. Y compris Juliet, qui devient rapidement sa petite amie.
Contre toute attente, les trois ados se lient d’amitié. Vite inséparables, on les voit ensemble zoner au son du hard metal qu’ils affectionnent. En compagnie de Johnny, Larry pénètre dans un univers de drogue, de sexe et de brutalité masculine. Avec Juliet, il fait l’expérience des affres de l’amour à sens unique.
Conscient des dangers qu’impliquent ses nouvelles fréquentations, le jeune Dogrib ne veut pourtant pas sacrifier son amitié avec ceux qui sont devenus ses seuls confidents. Auprès d’eux, il est ce conteur hors pair auquel on réclame encore et encore de nouvelles histoires, dont on ne sait jamais si elles sont tragiquement vraies ou simplement le fruit de son imagination. Avec eux, il peut s’ouvrir un peu sur les zones d'ombre d’un passé qu’on pressent torturé.



À travers le village fictif de Fort Simmer, calqué sur celui de son enfance, Richard Van Camp dénonce les conditions de vie déplorables des siens dans les années 80 (et peut-être encore aujourd’hui ?). Drogue, alcool, sexe et mauvais coups y sont de faciles échappatoires à l’oisiveté et à l’ennui, dans lesquelles il est facile de se noyer.

Livrés à eux-mêmes, sans réelle autorité parentale, en manque de repère et d’affection, les ados désabusés du trio qu’il dépeint ont les mêmes préoccupations que tous les ados du monde entier, Native Americans ou pas : se forger leur propre identité, s'émanciper et vivre leur vie.
Entre tous, Larry le poète est un personnage émouvant, de ceux qui appartiennent au cercle restreint des figures littéraires marquantes. En laissant en suspens certains aspects de son passé, Van Camp le nimbe d’un halo de mystère qui le rend d’autant plus insaisissable.

Attention, sous prétexte que ses protagonistes sont des adolescents, il ne faudrait pas prendre The Lesser Blessed pour ce qu’il n’est pas : un roman facile pour jeunes lecteurs. C’est un magnifique roman d’apprentissage, sombre et sans concession (le langage parfois cru des personnages ne manquera pas de choquer les plus prudes), aussi court que puissant.
C’est aussi un hymne à la résilience, un message d’espoir lancé à tous ceux qui sont fermement décidés à se prendre en main pour réchapper de leur condition.

Il est regrettable que ce roman, traduit par Nathalie Mège, paru chez Gaïa en 2003 sous le titre Les Délaissés, soit aujourd’hui épuisé. À quand une réédition ? À moins d’un rachat du titre par un éditeur plus clairvoyant ?

The Lesser Blessed - Extraits

*    *    *    *    *
« Larry est très touchant et le roman parle d’amour, de réconciliation, d’amitié. Richard Van Camp a créé un adolescent tellement réel et poète à ses heures qu’il m’est difficile de ne pas croire en son existence ! Un personnage de fiction magnifique. »   Electra

« Dès les premières pages, le style incisif, vigoureux et cru m’a fait l’effet d’un coup de massue, m’a happée pour ne plus me lâcher jusqu’à la toute fin. »   Marie-Claude

« C’est un monde très dur que décrit Richard Van Camp, à travers ces ados bercés de heavy metal et plus ou moins laissés à eux-mêmes. Dans une langue qui mélange verdeur, réalisme et poésie, l’auteur nous montre des jeunes gens se battant seuls avec les difficultés de la vie. Un roman brûlant. »   Papillon

Richard Van Camp - The Lesser Blessed (Douglas & McIntyre, 1996)

Commentaires

  1. Si on ne le trouve plus en français, je ne pourrai pas le lire. Il n'est pas à la bibliothèque...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. S'il t'arrive de faire les vide-greniers ou les bouquineries, reste à l'affût ! Ce roman vaut vraiment qu'on se donne du mal à le trouver.

      Supprimer
  2. Il est épuisé ? C'est dommage, pourquoi pas une réédition en effet. Les romans noirs américains marchent bien, et celui-ci semble un bon cru.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En publiant sur FB le lien vers ce billet, j'ai tagué Gaïa, en espérant une réaction, voire une réponse, de leur part au sujet d'une éventuelle réimpression. Silence total.
      Peut-être faudrait-il glisser l'idée à Gallmeister ?

      Supprimer
  3. Ravie de voir que tu l'as aimé autant que moi - n'étant pas fan du tout des romans jeunesse, je te rejoins sur sa profondeur et sa complexité !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est un très beau roman qui mériterait un nouveau coup de projecteur... et une nouvelle impression :)

      Supprimer
  4. Et bien, tu nous donnes envie pendant toute la lecture de ton post, et juste à la fin tu nous dis qu'il est épuisé ? Mais c'est très dur ce que tu fais là !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Qui sait ? Tu peux peut-être le trouver en bibliothèque ou en bouquinerie... voire même sur la Toile, pour pas cher.

      Supprimer
  5. Je suis ravie que tu aies pu mettre la main dessus et t'en délecter comme moi.
    Il aurait, de fait, avantage à être à nouveau publié ce roman... sans trop tarder, même...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait, comme tu m'avais prévenu du mal que tu avais eu à la trouver, je n'ai même pas cherché l'édition française, j'ai pioché directement la VO qui est très facilement accessible.

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Si le post auquel vous réagissez a été publié il y a plus de 15 jours, votre commentaire n'apparaîtra pas immédiatement (les commentaires aux anciens posts sont modérés pour éviter les spams).