Les Portes de Thèbes, Mathieu Riboulet

03.Mathieu Riboulet - Les portes de Thèbes Eclats de l'année 2015_big

Déjà deux ans que Mathieu Riboulet s’en est allé, emporté prématurément par un cancer du foie.
Son dernier texte posthume, Les Portes de Thèbes. Éclats de l’année deux mille quinze, paru en début d’année, est à mes yeux un des plus beaux.

En novembre 2015, trois jours après les attentats de Paris, l’auteur se voit notifier la maladie dont il souffre. Il ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec le cancer qui avait été annoncé à son père quelques jours autour des attentats du 11 septembre 2001.
Pour autant, ça serait mal connaître Riboulet pour croire qu’il va faire de sa maladie le sujet de son livre ou, pire,  qu’il va s’épancher sur lui-même. La perspective de sa fin prochaine est le point de départ de son ultime texte qui s’appuie sur un parallèle avec Les Sept contre Thèbes, d'Eschyle.

En s’interrogeant sur les motivations des terroristes de Paris, sur l’euphorie qu’ils tirent de leur sacrifice et du pouvoir de vie ou de mort qu’ils ont entre les mains, il va explorer une chronologie des maux du monde moderne en puisant dans ses souvenirs personnels (notamment sa traversée de la Yougoslavie en 1991) ou dans les grands évènements internationaux comme la guerre d’Irak ou la signature des accords Sykes-Picot en 1916, autorisant les puissances coloniales française et britannique à se partager le gâteau du Proche et du Moyen-Orient, et source de tous les conflits qui déciment les populations de la région depuis lors.



Plus encore que dans Les Œuvres de miséricorde ou dans Entre les deux il n'y a rien, il lie intimement le personnel et l’universel, le politique et la sexualité, la violence et le désir des corps.
Au sacrifice, Riboulet oppose l’offrande. À ces conflits, il oppose la fraternité des corps, l’ouverture à l’Autre, qu’il faut s’efforcer de comprendre et de savoir accueillir. Car pour lui, il n’y a pas les bons d’un côté et les mauvais de l’autre, mais seulement l’Homme qu’il invoque dans ce vibrant chant d’amour.
Avec ce que je ne pense pas abusé d’appeler son œuvre testamentaire, Mathieu Riboulet offre un texte sensuel magnifique, d’une puissance absolue, empreint d’une lumière singulière, tout entier tourné vers l’autre.

J’aurais tendance à dire que s’il fallait ne lire qu’un texte de Riboulet, ce serait Les Portes de Thèbes.

Les Portes de Thèbes - Extraits

Mathieu Riboulet - Les Portes de Thèbes.
Éclats de l’année deux mille quinze
(Verdier, 2020)

Commentaires

  1. Je n'ai toujours pas lu cet auteur, que je connais pourtant. Une amie est une grande admiratrice de l'homme et de l'auteur. Je crois qu'il va falloir que je découvre.

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    1. C'est un auteur exigeant, pas forcément facile d'accès mais c'est un de ceux qui, quand je les lis, me donnent l'impression de devenir moins bête...

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  2. Je le lirai ! ( et puis cette couverture ). Je garde un grand souvenir de " entre les deux il n'y a rien ", et du petit opus " prendre date " aussi. Il faudra que je retente pour Les oeuvres de miséricorde, je crois que je n'étais pas suffisamment disponible pour recevoir ce texte.

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    1. Il faut effectivement avoir l'esprit disponible pour déguster Riboulet. J'ignore si les années prochaines nous offriront notre lot de textes posthumes, mais je me réjouis déjà de savoir qu'il me reste toujours quelques textes antérieurs à découvrir.

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  3. Noter les Portes de thèbes, alors? Il arrivera à la bibli, j'ai noté sur ma liste perso.
    Je n'ai lu que A la lecture (et ça parle de Proust!) donc c'est bien. ^_^

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    1. Mieux que les noter, les lire ! Et les savourer.

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    2. D'accord d'accord! Mais là il est juste en commande à la bibli (fermée) ^_^

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  4. Je ne le connais pas non plus, hormis par les billets que tu as déjà publiés le concernant, et qui m'avaient incitée à le noter, d'autant plus que les Editions Verdier me déçoivent rarement. Je retiens ton conseil, en faisant de ce titre une priorité.... Merci pour cette belle proposition de lecture.

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    1. C'est un auteur qui me réjouis à chaque fois que je le lis. Cette fois-ci plus encore que les autres. Il y a dans ce texte une lumière (luminosité?) particulière qui n'est pas aussi palpable dans les autres textes de lui que j'ai lus précédemment.

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  5. je suis du même avis de Krol, c'est noté pour moi! merci.

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    1. J'espère que ça te plaira. En tout cas, je serai curieux d'avoir ton retour.

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  6. Je ne connais pas cet auteur, je note, merci

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    1. Je ne me souviens plus comment je suis venu à M. Riboulet, quelles ont été les circonstances qui m'ont mis entre les mains le premier roman de lui que j'ai lu, à savoir Avec Bastien. C'est un auteur qui se faisait plutôt discret.

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  7. Je garde un souvenir intense de L'Amants des morts. Je retiens Les portes de Thèbes pour poursuivre la lecture de son œuvre.

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    1. Je n'ai pas encore lu L'Amant des morts et, celui-là, il me tarde particulièrement de le savourer.

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  8. je ne le connais qu'à travers tes billets, du coup je suis intriguée. Mais j'ignore si c'est fait pour moi.

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    1. Honnêtement, de ce que j'ai pu cerner de tes préférences littéraires, je ne suis pas certain que ça "matche" entre vous deux. Pour autant, pour s'assurer de ne pas passer à côté du grand amour, je pense que ça mériterait de prendre le temps d'un speed-dating, histoire de prendre la température avant de faire le grand plongeon.

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  9. Voilà, dès que vu à la bibli, emprunté et lu!
    Très beau texte, écriture somptueuse, j'ai plusieurs fois eu l'impression de lire un alexandrin , cadence superbe!
    Ton billet est parfait, je ne vais pas en ajouter.
    Je peux chipoter : une fois qu'on a compris ce qu'il veut dire, il y revient pas mal. j'ai été gênée qu'il donne les prénoms des terroristes (je suppose, car je ne les connais pas) . Mais je recommande cette lecture, c'est assez sombre et lumineux à la fois (fichtre, quelle écriture!)

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