Le mystère Maier n’en finit pas de nous interroger

Vivian Maier - Self portrait, 1979   (source)

Le plus novice, le moins connaisseur des regards ne peut être que saisi par la densité, la force, l’unité de l’ensemble. Par cet œil posé sur la vie, sur toutes ces histoires qui se dévoilent en un cliché, histoires urbaines, dans le mouvement, dans la matière compacte de la ville. Le terrible, le tendre, le drôle, l’insolite. Le vrai. Le presque rien qui révèle un destin. (p. 20)

John Maloof tient une certitude : il a découvert,
inventé, selon l’expression consacrée, un trésor. Début de l’histoire. John Maloof va en effet inventer Vivian Maier. La révéler, au sens photographique du terme. Naissance et résurrection d’une artiste de génie. Naissance d’une énigme. (p. 24)

Et que dire de ces innombrables autoportraits qui suffiraient à faire œuvre ? Elle s’y montre dans une troublante présence-absence, en dévoilant des fragments de corps ou de visage, champ et hors-champ, décalée, décentrée, inventant une forme de désagrégation, d’effacement du sujet, comme une métaphore de sa propre existence. Une dérisoire résistance contre le néant, comme la réassurance de sa propre identité. (p. 29)

[…] le mystère Maier n’en finit pas de nous interroger. Insoluble secret d’une existence, terrifiante solitude d’une femme dont le geste photographique, le geste seul donna un sens à la vie, la sauva peut-être du désespoir. Inconcevable pour nous aujourd’hui, en ces temps où nos fragiles et exigeants ego quêtent sans fin l’approbation, l’admiration, le regard. (p. 31)

C’est une entreprise vertigineuse de se pencher au-dessus du gouffre d’une vie, de tenter de déchiffrer un destin dans ses contre-jours, dans ses détours, dans ses possibles et ses points de suspension. C’est lancer un tamis dans le fleuve et ramener à la surface tessons, clous rouillés et pierres aurifères. C’est déchiffrer toute cette moisson. C’est écouter une voix perdue par-delà la rumeur du temps et tenter d’en percevoir l’écho. (p. 145)

*sur ma liseuse

Gaëlle Josse - Une Femme en contre-jour (Notabilia, 2019)

Commentaires

  1. je me contenterai d'avoir vu deux fois l'expo, complétée d'un petit film sur sa vie...

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    1. Si c'est à À la recherche de Vivian Maier (Finding Vivian Maier) que tu fais allusion, ce n'est pas un "petit" film. C'est quand même un documentaire d'une 1h30.😉

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