Récap août 2015


Donna Tartt - The goldfinch (Little, Brown and Company-2014)
Finalement, Donna Tartt fait du Donna Tartt. Ce qui réjouit certainement ceux qui l’apprécient… et qui confirme les craintes que j’ai eues quand Sister m’a offert ce livre.
J’y ai retrouvé les mêmes défauts que dans Le Maître des illusions. : pléthores de digressions et de précisions inutiles à la compréhension et à la progression du récit ; une histoire qui ne tient pas ses promesses et s’essouffle rapidement ; des personnages peu aimables (dans le sens premier du terme)…
Si on peut reconnaitre à Tartt un sens aigu de l’observation (à tel point que je me suis surpris plusieurs fois à imaginer ce que certains passages auraient pu donner s’ils avaient été exploités sous forme de nouvelles), le roman y gagnerait en puissance s’il était soulagé de plusieurs dizaines (centaines ?) de pages. J’ai apprécié les rares moments où pointe l’émotion (sans donner dans le sentimentalisme, on s’étonne qu’avec un roman pareil, ils ne soient pas plus nombreux). J’ai été frappé d’ennui à maintes reprises mais je l’ai tenu jusqu’au bout… jusqu’à la pseudo-morale « made in America ».
Bref, une vraie déception annoncée.
Extraits


Laurent Mauvignier - Retour à Berratham (Minuit-2015)
Parce que Mauvignier, je me devais de lire ce livret pour les ballets Preljocaj, créé dans la Cour d’Honneur du Festival d’Avignon, le 17 juillet dernier.
Contre toute attente, la courte histoire (trop courte ? 80 pages) de ce jeune homme à la recherche d’un amour de jeunesse, de retour dans sa ville natale fortement meurtrie par un conflit récent, ne m’a pas touché le moins du monde. Je n’y ai pas retrouvé la force habituelle des textes de l’auteur, son art à faire sourdre les émotions. J’ai trouvé le propos trop appuyé, pas spontané, très froid…
On touche sans doute à la limite de ce type de textes destinés au théâtre ou, plus spécifique ici encore, à une adaptation chorégraphique. J’aurais sans doute mieux apprécié les mots de Mauvignier si j’avais pu assister au ballet.
Tout le contraire, en revanche, avec Tout mon amour (Minuit-2012) dont j’ai beaucoup aimé  les tensions familiales, le retour d’un homme dans la maison de son enfance à l’occasion de l’enterrement de son père, le deuil impossible de sa femme pour sa fille morte dix ans plus tôt dans cette même maison, les déchirements et incompréhensions qui en découlent…


E. Lockhart - We were liars (Delacorte Press-2014)
J'ai passé un très bon moment avec ce roman jeunesse plutôt bien fichu, tant dans sa narration que dans sa construction. Je m'y suis jeté sans rien savoir de l'histoire, et heureusement, même si j’ai rapidement subodoré un “loup” (sans jamais rien deviner du “twist” final). Les adultes y trouveront leur compte en s’attardant plus spécifiquement sur la critique acide des conventions sociales qui régissent les dynasties d'une certaine “bonne” société américaine du Massachusetts.


David James Poissant - The heaven of animals (Simon & Schuster-2014)
Un vrai bonheur que ce recueil de 15 nouvelles centrées autour d’individus lambda, brisés chacun à leur façon par la vie. Il y est souvent question de rédemption, de regrets, de difficultés à communiquer, à exprimer et à partager ses sentiments… Avec une économie de mots, Poissant campe ses personnages et installe la situation, fait naître les émotions, souvent à fleur de peau… Et si dans ces textes les destins sont accidentés, les rédemptions et réconciliations parfois trop tardives, il y pointe encore une infime lueur d’espoir qui fait chaud au cœur.
Si mes deux nouvelles préférées sont 100% cotton (qui m’a fait couler une larme) et Nudists, j’ai aussi particulièrement aimé : Lizard man et The Heaven of animals, les nouvelles qui ouvrent et referment le recueil ; Amputee, The end of Aaron, The disappearing boy. En revanche, j’ai beaucoup moins accroché aux incursions de l’auteur dans l’univers du fantastique (Knockout, What the wolf wants, The baby glows).
Extraits 1  Extraits 2

James McBride - The good lord bird (Riverhead Books-2013)
Au crépuscule de son existence, Henry Shackleford fait le récit de son enfance et de ces presque 15 ans passés dans la peau d’une fille, aux côtés de John “Old Man” Brown, abolitionniste dont la défaite cuisante lors de l’attaque de l'arsenal d’Harper’s Ferry sonnera le début de la guerre de sécession
Ce roman drôle et enlevé est une sympathique façon de s'immerger dans la naissance du mouvement abolitionniste aux États-Unis (même si je confesse avoir senti poindre l’ennui une fois ou deux, lors des scènes préparatoires aux batailles).
Outre Brown dont je ne me souviens pas voir entendu entendu parler auparavant, j'ai aimé y croiser les figures illustres d'Harriet Tubman et de Frederick Douglass (dont McBride prend un certain plaisir à écorner l’image quasi iconique).
McBride donne à réfléchir sur le paradoxe de la situation : ces blancs qui s’engagent et combattent pour rendre leur liberté à des esclaves noirs qui semblent pour la plupart subir les événements, libérés presque contre leur gré, souvent plus enclins à un immobilisme rassurant qu’à entrer dans une lutte armée pour des lendemains incertains.
Se posent alors des questions telles que : Peut-on décider pour l'autre de ce qui est bon pour lui ? Pour qu'il réussisse, un grand mouvement réformiste ne peut-il réussir que s'il est mené par les premiers concernés?
C'est tout cet aspect des événements décrits par McBride qui m'a vraiment beaucoup plu.
Extraits

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