Récap avril 2017
Lauren Groff - Fates and furies (Penguin-2015)
Chronique d’un couple de new yorkais, mariés sur un coup de foudre à 23 ans ; lui, Lotto, d’abord comédien, puis dramaturge à succès à Broadway ; elle, Mathilde, effacée, fidèle support de son mari, qui, pendant les années de vache maigre, subvient aux besoins du couple en travaillant dans une galerie d’art. Ces deux-là se sont trouvés et font la paire. Du moins, c’est ce que laissent penser les apparences.
La première partie « Fates » est vue du point de vue de Lancelot ; la seconde, « Furies » de celui de Mathilde, ce qui éclaire d’un jour nouveau tout ce qu’on sait de la vie du couple… et qui réserve quelques surprises.
C’est bien parce que mes 3 références bloguesques (Cuné, Papillon, Profplatyptus) avaient été enthousiasmées par ce roman que je me suis forcé à aller plus loin dans ma lecture car j’ai trouvé la première partie longuette et limite cliché. La seconde est plus intéressante par tous les questionnements qu’elle pose sur le couple (connait-on jamais ceux avec qui on vit ?), le mensonge, les blessures de l’enfance…
Extraits
Philippe Besson - Arrête tes mensonges (Julliard-2016)
Histoire d’un premier amour, au fin fond de la France. Deux destins qui vont bifurquer. Un va quitter la campagne pour réussir sa vie à Paris. L’autre va rester, frustré de ne pas vivre la sienne comme il le souhaiterait…
Je n’ai pas vraiment été touché par cette histoire d’amour que j’ai trouvé peu originale et plutôt convenue (j’ai même été un chouia agacé par l’exégèse que fait Besson de son œuvre). En revanche, j’ai beaucoup aimé la fin du roman, où l’auteur évoque cet amour, des années plus tard, avec le fils de son amant perdu.
Extraits
Hugo Horiot - L'empereur, c'est moi (L'Iconoclaste-2013)
Récit poétique d’une enfance autiste, pour la majeure partie des lecteurs, que j’ai pris, moi, comme un vomissement de haine et de mépris jeté en pleine face. On ne s’étonnera pas donc que je n’aie pas du tout aimé. Heureusement, c’est court.
« A tous ceux qui prennent part au génocide de la différence au nom de l'indifférence »
« Je suis obligé d’accepter ce monde qui n’est pas le mien. Je n’ai pas le choix, sinon Hugo finira aussi dans la terre noire. Il faut que j’ouvre la bouche. Je dois parler. Les autres enfants sont bêtes et parlent très mal. Je ne veux pas parler pour dire les mêmes sottises qu’eux. Je ne veux pas devenir comme eux. Je ne veux pas crier comme eux. Moi, à l’école, je crie à l’intérieur ! Vous n’imaginez pas le cadeau que je vous fais. Quand je hurle, la terre tremble, les murs se brisent, les oiseaux cessent de chanter et meurent. Ma mère le sait très bien. Quand j’erre parmi vous, je dissimule ma souffrance et ma colère au plus profond de moi-même. Si vous deviniez ma colère, elle pourrait vous tuer.
Hugo doit être capable d’ouvrir la bouche sans que tout cela se voie. Hugo doit apprendre à mentir à la face du monde en dissimulant son mal. Parler, c’est mentir. Eh bien, je mentirai puisque c’est ce qu’on attend de moi. Chaque parole, chaque syllabe qui sort de ma bouche représente un effort surhumain, car c’est un compromis que moi, Hugo, je dois faire avec les autres. Je sais que chaque pas vers les autres me rendra de plus en plus dépendant d’eux, et donc de vous. Je vais devoir accepter d’être dépendant de ceux qui ne m’inspirent aucune confiance. Chaque mot, chaque son qui sort de mes entrailles sera une abdication. Chaque pas vers les autres m’éloignera de mon royaume. Chaque mot me tue.
Les autres bougent tout le temps, ils ne pensent qu'à crier et ils ne veulent rien savoir de la terre et du cosmos. Tant pis pour eux. Et pourtant il parait que c'est moi qui ai un problème.
Mon problème, c'est vous. »
Colombe Boncenne - Comme neige (Buchet Chastel Qui Vive-2016)
Lors d’un séjour morose, un lecteur trouve dans un recoin d’une librairie de province un livre de son auteur fétiche, inconnue de lui : Neige noire. De retour chez lui, il entame des recherches sur ce mystérieux roman… dont il ne trouve aucune trace dans les archives, la biographie de l’auteur ni même chez son éditeur.
Plaisant, sans plus.
« Nous formions désormais un couple de solitaires, que seuls les agacements quotidiens semblaient unir. »
« Je dépliai mon journal non sans jeter un coup d'œil à mon voisin d'en face pour essayer de déchiffrer le titre qu'il lisait - habitude de voyeur littéraire. »
« Il est du destin de la plupart des livres de n'éveiller plus nulle part aucun souvenir. »
« L’été, Suzanne parvenait toujours à me traîner sur l’île de Groix, en Bretagne, quand moi, je rêvais de soleil et de rythme méditerranéen. Suzanne était plus douée que moi en matière d’organisation, elle me prenait toujours de court, réservait une location très en avance, convainquait des amis de venir avec nous et usait de toute la mauvaise foi qui pouvait être la sienne lorsque je protestais : « Tu n‘avais qu’à t’en occuper, des vacances. » Alors, en fait de tapas, d’horaires décalés et de soirées langoureuses, je me retrouvais à filer sous la halle aux aurores pour espérer y acheter quelque poisson pêché dans la nuit, puis chez un éleveur de chèvre baba-cool pour tâcher d’y obtenir un fromage frais ; l’après-midi sur la plage, à essayer de me baigner dans une eau à 17 degrés sous le prétexte d’un rayon de soleil ; enfin le soir, à jouer au Scrabble au coin du feu, car oui il faut l’admettre, un bon petit feu nous réchaufferait. Et encore, je parle des jours où la météo était clémente. Quatre semaine passèrent ainsi, je me baignai quatre fois et gagnai dix-sept parties de Scrabble sur trente-huit- c’est dire le temps qu’il fit. »
Richard Yates - A special Providence (Vintage Classics-2008) [1969]
Se gavant d’illusions sur sa reconnaissance à venir, Alice Prentice, femme fantasque, se rêve en sculptrice, artiste à succès, et accumule dettes et déceptions amoureuses. Mère étouffante, elle élève seule son fils Robert qu’elle a ballotté toute son enfance de déménagement en déménagement. En 1944, Robert voit dans la conscription l’occasion d’échapper à la relation exclusive qu’il a avec sa mère et de réaliser ses rêves d’héroïsme. Il s’engage pour la France où il se révélera un bien piètre soldat : pour tout acte de bravoure, il s’en tirera avec une pneumonie qui le clouera dans un lit d’hôpital jusqu’à la fin de la guerre.
Si les épisodes relatifs à la guerre m’ont plutôt ennuyé, je me suis délecté de la description cruelle de la relation toxique mère/fils et de la pathétique spirale d’échecs dans laquelle elle entraîne son fils malgré lui.
Extraits
Jean-Philippe Blondel - Le groupe (Actes Sud Junior-2017)
Le groupe en question est un atelier d’écriture qu’un prof d’anglais, auteur ayant acquis une certaine renommée, met en place dans son collège de province. Pour qui connaît un peu l’auteur, la trame est transparente. Pour autant, quelle est la part de vérité quelle est celle de fiction ? N’empêche, je n’ai pas accroché et trouvé l’exercice un peu vain. Et cette impression de déjà vu avec ces thèmes récurrents à chaque nouveau roman…
« Il ne le sait pas, il ne le saura jamais, mais il est la raison pour laquelle je me suis inscrit sur les réseaux sociaux cette année, afin de rechercher ceux qui ont peuplé ma vie pendant mon adolescence et dont j'ai perdu toute trace. J'ai passé des heures sur internet. Je renoue des contacts. C'est ridicule. C'est embarrassant. Mais c'est très émouvant. Décevant, aussi, parfois, quand on s'aperçoit au bout de quelques messages qu'en fait, on n'a plus rien à se dire à part échanger des souvenirs lointains - et qu'on se connaît si peu, finalement. Qu'on s'est croisés à un moment donné. Qu'on s'est juré une amitié éternelle qui n'a pas résisté plus de six mois. » (p. 45)
« C'est confortable, le stéréotype. Les gens te mettent dans une case, et si tu te conformes en gros à ce qu'ils attendent de toi, ils te laissent vivre ta vie. […] Correspondre à un stéréotype, c'est gagner de la liberté, et continuer son chemin à couvert. » (p. 70)
Lori Ostlund - After the parade (Scribner-2015)
Aaron, la quarantaine, décide de quitter son compagnon de longue date, Walter, de vingt ans son ainé. Un soir, il entasse toutes ses affaires dans sa voiture, direction San Francisco où il compte commencer une nouvelle vie.
Une fois sur place, les choses (logement, école où il enseigne) ne sont pas aussi roses qu’il l’avait pensé. Surgissent alors les réminiscences de son enfance : son père, flic violent, mort accidentellement ; sa mère, qui l’a abandonné en disparaissant un soir.
C’est beau, triste, drôle, émouvant, et superbement écrit. Un grand roman.
Extraits
Un abandon :
Ralf Konig - Barry Rouston-Dans l’espace, personne ne t’entend grogner (Glénat-avril 2017)
Délire spatialo-sexy, où se rencontrent extraterrestres lubriques et hommes velus, chers à König. Trop barré pour moi, humour à ras des pâquerettes qui ne m’a pas arraché un sourire.
Heureusement, un défaut de fabrication (on passe de la planche 172 à la 174)* m’a permis de me faire rembourser la BD que je n’ai même pris la peine de finir (car je ne pense pas que l’absence de la page 173 m’ait empêché de suivre l’intrigue).
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