« Il y a des gestes qui, si on ne les fait pas, existent quand même. »
Tom Cullen et Chris New dans “Week- end”, d'Andrew Haigh (Credit Quinnford & Scout/Sundance) |
Tomber amoureux est la pire des pertes de contrôle, une mise à genoux de la vie qui n’engendre qui mièvrerie et troubles de la concentration.
(p. 17)
Avec le temps, l’amour avec Alex a muté en une profonde affection fraternelle dont la première des conséquences est une exclusion pure et simple du sexe puisqu’on ne couche pas avec son frère. L’absence totale de sexualité, cette forme bizarre de désert blanc où j’évolue sans me plaindre, n’a eu aucune influence sur l’équilibre de notre couple qui, plus il ne baise pas, plus il se fait confiance. […] Je m’accommode parfaitement de cette abstinence conjugale puisqu’elle est compensée par quelques escapades qui ne dérangent rien ni personne.
(pp. 16-17)
[…] une fois tous les deux ou trois mois, je m’offre les services d’un escort qui m’aide à satisfaire mon attirance pour ces hommes dont je ne tiens pas à savoir s’ils aiment se vendre ou s’ils sont contraints de le faire. Je leur demande de me maintenir la tête au-dessus de la surface de l’eau dans des jeux sexuels somme toute très classiques mais dont j’ai redécouvert les bienfaits hygiéniques.
(p. 50)
Depuis que nous ne faisons plus l’amour, j’ai la conscience crapuleusement tranquille et, […] je n’ai jamais eu l’impression de le tromper. Tout se situe tellement ailleurs avec les prostitués, qu’il ne me viendrait jamais à l’idée de faire le rapprochement entre ce que je vis dans leurs lit et ce que je vis de mon histoire avec Alex.
(p. 51)
Alex a su exploiter au maximum son pouvoir de séduction sur les bourgeoises. Il sait mieux que quiconque aborder ces femmes qu’il faut entretenir sur la luminosité du make-up, la perfection de la coupe du vêtement, le design incroyable d’un bijou, tout en évitant les sujets qui fâchent – l’âge, la ligne et la politique. J’ai depuis longtemps renoncé à me frotter à ces dames qui me laissent complètement indifférent et qui, lorsqu’elles prennent la peine de se pencher sur ma personne, me trouvent désagréable et dénué d’humour, crime des crimes sur une scène où l’on aime rire de tout et surtout des autres.
(pp. 73-74)
C’est pas parce qu’on est infidèle à une femme qu’on aime celle avec qui on la trompe.
(p. 120)
Dans l’atelier, j’ai eu envie de le prendre dans mes bras, mais je n’ai pas osé. Il y a des gestes qui, si on les fait, ne portent pas à conséquence ; il y en a d’autres qui, si on ne les fait pas, existent quand même.
(pp. 125-126)
Sébastien Ministru - Apprendre à lire (Grasset, 2018)
J'ai beaucoup aimé Week-end (mais il faut dire que j'adore Tom Cullen qui me fait fondre). Ils sont beaux tes extraits.
RépondreSupprimerJ'ai honte de l'avouer mais je n'ai toujours pas vu ce film (ce n'est pourtant pas l'envie qui manque) mais je suis d'accord avec toi, Tom Cullen est sexy à souhait.
SupprimerJ'aime beaucoup la dernière citation.
RépondreSupprimerLaisse-toi tenter, c'est un beau roman. J'imagine qu'on en a parlé un peu plus en Belgique qu'ici. Il est en lice pour le Prix Récamier 2018. Ça pourrait l’occasion de braquer les projecteurs sur ce livre et lui apporter l'attention qu'il mérite.
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