Récap de janvier 2022

 
Cynthia Carr - Fire in the Belly: The Life and Times of David Wojnarowicz (Bloomsbury, 2012)
Arnaud Cathrine - Début de siècles (Verticales, 2022)
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J’ai passé l’essentiel de janvier en compagnie de David Wojnarowicz, artiste polymorphe, peintre, photographe, réalisateur, écrivain. C’est en m’intéressant au photographe Peter Hujar, qui a été son mentor, que j’ai croisé pour la première fois son nom. Figure majeure de l’art aux États-Unis, il reste encore peu connu en France. En tout cas beaucoup moins que certains de ses contemporains de l’East Village du New York des années 80, comme Keith Haring, Jean-Michel Basquiat, Kenny Scharf , Nan Goldin ou Robert Mapplethorpe.
Aussi, quand j’ai appris l’existence cette biographie par Cythia Carr, familière du milieu artistique de cette époque qui a connu "Wojna", je n’ai pas hésité longtemps avant de me plonger dans les quelque 600 pages de Fire in the Belly : the Life and Times of David Wojnarowicz, qui retracent le parcours de l’artiste et l’effervescence du milieu artistique interlope qu’il côtoyait.  
Et plus encore que la vie – pour le moins tourmentée – de Wojnarowicz, c’est justement l’immersion dans le quotidien des mouvements artistiques du New York underground et dans le climat politique de l’époque qui m’a le plus passionné dans ce livre. Et si, de par son comportement, la personnalité troublée de Wojnarowicz ne m’est pas apparu particulièrement aimable, elle n’en reste pas moins attachante.  La rage permanente qui habite cet écorché vif m’a ému, sa vision politique de la vie et de la société ont trouvé chez moi une caisse de résonance. Tant et si bien que ma prochaine étape sera de lire (quand ?) certains de ses écrits comme In the Shadow of the American Dream  ou Close to the Knives: A Memoir of Disintegration.
Affaire  suivre, donc...
Fire in the Belly : the Life and Times of David Wojnarowicz - Extraits


 
 
Dans son nouveau recueil, Début de siècles, Arnaud Cathrine fait alterner le XXe et le XXIe siècles, les années 1920 et 2020, les personnalités illustres (Jacques Rigaut, Annemarie Schwartzenbach, Eileen Gray, Roland Barthes, Jean Cocteau, Raymond Radiguet Sonia Delaunay, ...) et les personnages fictifs anonymes (une actrice en burn-out, un ado qui vit ses premiers émois amoureux, un homme de retour sur les lieux de son adolescence, deux frères qui se disent enfin ce qu’ils ont sur le cœur, un écrivain en vacances...). Dans ces duos amicaux ou amoureux, il en est toujours un qui aime ou a aimé, tandis que l’autre n’aspire qu’à partir et (re)prendre sa liberté.
Dans ces onze nouvelles, il est principalement question de relations. Amoureuses ou amicales, naissantes ou finissantes (souvent), voire mortes. Douloureuses, toujours. Les lieux aussi, y tiennent une place centrale. Maisons (la résidence E1027, la maison d’enfance, l’appartement de vacances....) ou paysages (de bord de mer, souvent ; ensoleillés, la plupart du temps) où l’on vient se retrouver et se ressourcer.
En se glissant dans la peau de ses personnages, Arnaud Cathrine réussit non seulement à s’immiscer dans leurs psychés mais aussi à capter le ton de l’époque, modulant ainsi son style et son lexique selon qu’on est en 1917 ou en 2020. C’est sans doute la raison pour laquelle j’ai souvent préféré les nouvelles se déroulant au début du siècle passé, à l’élégance raffinée et au charme un peu suranné (qui n’a pas été sans me rappeler Sagan par moment).
Il émane de ce recueil teinté de nostalgie un goût doux-amer dont je me suis délecté. C’est sans doute, des livres d’Arnaud Cathrine que j’ai lus, celui que j’aime le plus à ce jour.
Début de siècles - Extraits

Commentaires

  1. Des livres d’Arnaud Cathrine que tu as lus, celui que tu aimes le plus à ce jour? J'étais déjà convaincu de me le procurer, mais là, ça devient incontournable!

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    1. En même temps, je ne les ai pas tous lus (et tu en as certainement lus davantage que moi) mais il y a dans celui-ci un je-ne-sais-quoi dans l'écriture qui m'a plus plu que d'ordinaire.

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  2. je savais que le Caribou allait le vouloir ! du coup, je note qu'il sera chez elle ;-) un mois consacré à l'art donc .. effectivement je ne connaissais pas le nom de Wojna alors que les autres me sont familiers

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    1. Un mois consacré à l'art, oui, mais aussi (et surtout ?) une plongée dans mon adolescence et les années SIDA (quand je pense que j'étais à New York à cette période et que lui y était encore; malheureusement Haring est mort quelques mois avant que je m'installe)...
      Et après deux échappées chez mes auteurs chouchous, j'ai remis le couvert la semaine dernière avec un autre pavé biographique, sur George Platt-Lynes celui-là... Autres temps, mais pas vraiment autres mœurs 😀

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  3. S'il est beaucoup questions de maisons, je sens que je vais craquer pour les nouvelles !

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    1. Les lieux, les maisons, ne sont pas vraiment des "personnages" en eux-mêmes comme ça peut parfois être le cas dans certains romans mais ce sont des éléments importants, des refuges qui ont abrité/ou abritent une relation amoureuse/amicale.

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  4. Je ne connais non plus Wojna, mais je me sens peu fautive, vu que tu dis que je ne suis pas la seule ... La biographie étant en anglais, je ne pourrais pas le découvrir par ce biais, mais je vais regarder si je ne trouve pas d'autres références sur cet artiste, le milieu et l'époque étant un de mes "dadas" ... Pour le Cathrine, j'étais déjà convaincue, mais contente que tu confirmes.

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    1. Si le milieu artistique du New York des années 80/90 t'intéresse, un arrêt sur Wojnarowicz est incontournable. En français, je sais que ses écrits majeurs sont toujours disponibles, mais à ma connaissance, il n'y a pas d'ouvrage qui lui soit spécifiquement consacré.

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  5. Je ne connais pas (encore) Cathrine mais j'aime bien l'idée de l'immersion des personnages célèbres...

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    1. Ça me pose toujours question quand un auteur s'empare de personnages réels dans des textes de fiction. Je me demande toujours si ce n'aurait pas été plus "simple" de créer des personnages de fiction à partir de / inspirés de personnages réels (plus grand liberté vis à vis des faits biographiques, entre autres).
      Pour autant, n'ayant aucune connaissance biographique approfondie des personnages, ça ne m'a posé aucun problème. Mieux encore, j'ai adoré !

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