Pause, L'album de l'année, Fabcaro - CONversations, Jorge Bernstein feat. Fabcaro
Week-end avec Fabcaro,
n'augure rien de bon pour la fortune des hôpitaux.
Il y a une ironie savoureuse à constater comment les tribulations d’un hypocondriaque névrosé peuvent me remonter le moral !
Mon dimanche a été placé sous le signe Fabcaro (j'en entends déjà dire : "encore ??!!??"), impatient que j’étais de découvrir les deux opus qui m’ont été offerts pour Noël, sans compter Pause que j’avais acheté avant mais que j'avais prêté avant même de l’avoir lu. (ce qui est une première pour moi !)
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Dans Pause, on retrouve l’auteur quelques temps après le tsunami Zaï zaï zaï zaï. Fabcaro est lessivé, rincé, vidé par la vague du succès remporté par son dernier album.
Débordé par cette notoriété soudaine qu’il n’a pas recherchée, le bédéiste redoute de devenir prisonnier de son succès, de se voir condamné à faire et refaire la même chose à l’infini : Zaï zaï zaï zaï, le retour, Zaï zaï zaï zaï le retour du retour, Zaï zaï zaï zaï, l’enfance du héros...
Résultat : blocage, perte d’inspiration, page blanche. Trop de pression d’un coup. De la part du public, qui réclame la même chose mais pas vraiment pareil ; de son éditeur, qui lui laisse carte blanche et lui donne son feu vert pour n’importe lequel de ses projets les plus farfelus, démontant du même coup le peu de confiance que l’auteur a en lui... Que faire pour retrouver la flamme ?
Vis ma vie d’auteur de BD, again, avec L’Album de l’année.
Un an dans la peau d’un dessinateur dans ce que le quotidien a le plus trivial : les obligations familiales (la fête d’anniversaire des filles, les courses, les problèmes de plomberie et de voiture, la livraison du foin pour l’âne, les vacances à la mer...), professionnelles (bouclage, projets en cours, séances de dédicaces...), personnelles (hypocondrie, interactions sociales, refus de grandir...) et tous les aléas qui peuvent surgir dans une journée.
Pas facile de résumer sa journée en un instantané ; il faut savoir dénicher le petit truc décalé qui fait mouche. Car à moins d’être un explorateur parti du désert rejoindre le pôle pieds nus et en slip de bain, il n’est pas toujours évident de trouver matière à faire de sa journée une aventure mémorable.
L’originalité de l’entreprise de Fabcaro tient dans sa forme : à la manière d’un agenda semainier, chaque page contient 7 cases, soit une par jour de la semaine, introduite par l’annonce de la semaine, suivie d’un dicton « sauce Fabcaro »
Mission réussie pour Fabcaro qui ne cherche pas à tout prix à être drôle ou à « faire de l’humour ». Preuve que cette introspection ne se résume pas à un tour de son nombril de désespéré de naissance, en se penchant sur son cas, il parvient à donner dans l’universel avec des situations qui renvoient le lecteur à son propre quotidien, à ses propres doutes, envies, rêves, déceptions...Et toujours avec une bonne dose salvatrice d’humour et de dérision.
Mon grand-père attendait fébrilement chaque année son Almanach Vermot. Je serais dans le même état d’impatience si Fabcaro nous livrait chaque année un Album. (je m’étonne que La Cafetière n’ait pas saisi l’occasion de lancer chaque année un agenda reprenant certaines cases et/ou strips de Fabcaro)
Avec Pause et L’Album de l’année, j’ai retrouvé la veine autobio/analyse de Fabcaro, celle que je préfère jamais je ne me suis ennuyé. Et contrairement à certains avis faisant état de leur déception, n’hésitant pas à qualifier ces albums au mieux de « mineur », au pire de ratage prétexte à « renflouer le tiroir-caisse », c’est dans ces récits introspectifs où l’humour du désespoir côtoie l’autodérision et les pires doutes existentiels que je trouve Fabcaro le plus touchant de sincérité (ils ne sont pas nombreux ceux qui acceptent de ne pas se montrer sous leur meilleur jour).
Une chose m’a frappée à la lecture de ces deux opus : je me suis retrouvé de nombreuses fois dans les situations et questionnements évoqués par l’auteur, et notamment dans ses rapports malaisés aux autres, dans sa maladresse (pour ne pas dire incompétence) pour tout ce qui touche au pratique... (dans L’Album de l’année, j’ai ainsi repéré près d’une case par semaine. On s’amuse comme on peut !) Mais que l’hypocondriaque qui se cache en Fabcaro se rassure : l’autisme n’est pas une maladie (ouf !) mais un état, une neurodivergence ! (euh, p'têt pas ouf, alors
« Rien n’est pire que la liberté quand on est perdu »
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À part des deux albums précédents, CONversations n’est pas, comme je l’avais imaginé d’après le titre, un recueil d’échanges graphiques entre deux humoristes, Jorge Bernstein et Fabcaro.
Il s’agit en fait de la reproduction de conversations sur FB Messenger entre Bernstein et des brouteurs (si comme moi avant de lire ce livre, vous ne connaissez pas ce néologisme, un petit coup d’œil ici est nécessaire), Bernstein s’amusant à ferrer ses interlocuteurs avec des réponses à double-sens, des paroles de chansons... qui tournent à l’absurde, et se retournent à chaque fois contre les escrocs qui abandonnent leur proie, conscientes ou non qu’elles ont été tournées en ridicule.
Certains échanges (qui se résument tous à une demande d’argent) sont plus drôles que d'autres. Pour que la succession ne devienne lassante, elle est entrecoupée d’interludes dans lesquels Fabcaro instille une dose d’absurdité supplémentaire en déclinant un même dessin représentant deux hommes (un patron, Van Den Storme, et son employé, Duchaussoy) qui s’improvisent brouteurs.
«
En fait tu tournes en rond et tu fais des bouquins pour dire que tu
tournes en rond…
C’est pratique, tu peux tenir encore vingt ans comme
ça… »
Merci à mes filles pour leur soutien
Pause, de Fabcaro - Incipit
Merci à mes filles pour leur soutien
Pause, de Fabcaro - Incipit
Merci à Fabcaro ! En espérant qu’il continue à tourner en rond encore vingt ans comme ça !
Fabcaro - Pause (La Cafetière, 2017)
Fabcaro - L'Album de l'année (La Cafetière, 2011)
Bernstein, Jorge feat. Fabcaro - CONversations (Rouquemoute, 2018)
Fabcaro - L'Album de l'année (La Cafetière, 2011)
Bernstein, Jorge feat. Fabcaro - CONversations (Rouquemoute, 2018)
Je suis sûre d'en avoir lu plein, mais je ne retrouve pas tout sur le site de la bibli... Ah grace à Goodreads je retrouve aussi On n'est pas l) pour réussir, et Z comme Don Diego (ha ha tu ne les connais pas, hombre!)
RépondreSupprimerSi, si, je les connais... mais je ne les ai pas (encore) lus ! ;-D
SupprimerLes 2 tomes de Z comme Don Diego me tentent plutôt pas mal d'ailleurs... comme pas mal d'autres, je dois le reconnaître. Je suis foutu !
J'ai découvert Fabcaro avec "Le discours", j'ai vraiment aimé cet humour un peu triste, j'ai plusieurs fois éclaté de rire même si l'ensemble est assez mélancolique. J'ai envie d'aller faire un tour du côté de ces BD !
RépondreSupprimerSi tu as aimé Le Discours, tu aimeras Pause qui est parfois tout aussi désenchanté. Si tu veux de l'absurde, tentes Zaï zaï zaï zaï ou Moins qu'hier (plus que demain).
SupprimerJ'ai encore rien lu de Fabacaro mais je note L'album de l'année pour sa forme originale. Il faudra que je me décide à emprunter au moins une de ses BD...
RépondreSupprimerSi tu veux te faire une bonne idée du bonhomme, je crois qu'l ne faut pas que tu t'arrêtes à une seule BD si jamais tu n'accroches pas, car il varie les registres et il se peut fort bien qu'une de ses facettes te plaise plus qu'une autre...
SupprimerCONversations ne m'a pas convaincu mais les deux autres sont excellents !
RépondreSupprimerJe suis d'accord avec toi pour dire que des trois, Pause et L'Album de l'année sont loin devant.
SupprimerL'idée de départ de CONversations est plutôt bien vue, même si je ne serais pas étonné que d'autres que Bernstein aient appliqué le principe chez eux sans en faire un recueil. A la longue, il est vrai que ça peut vite lasser, c'est en ça que les interludes de Fabcaro sont les bienvenus.
Je n'en ai lu que deux de lui, ses deux derniers du coup je ne connais pas ceux-là, pause me tente bien et le journal d'un dessinateur- je les note !
RépondreSupprimerJ'ai commencé comme toi, par ses derniers opus (comme quoi, la découverte est récente pour moi). Et vu la production du monsieur, on a encore de quoi voir quelque temps pour rattraper notre retard :D
SupprimerJ'ai beaucoup aimé l'autodérision de Pause, du Fabcaro pur jus comme on l'aime !
RépondreSupprimerCette après-midi, j'ai lu Steak it easy que je situerais dans la même lignée que Pause. Encore un bon moment passé en compagnie de Fabcaro !
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