Récap de septembre 2021

 

Gabriela Cabezón Cámara - Les Aventures de China Iron (L'Ogre, 2021)
Jamie Cortez - Gordo (Black Cat, 2021)
Philipp Weiss - Le grand rire des hommes assis au bord du monde (Le Seuil, 2021)
Christel Petitcollin - J'ai pas les codes ! (Albin Michel, 2021)
Sebastian Barry - Des milliers de lunes (Joëlle Losfeld, 2021)
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Au programme : belles retrouvailles, jolie découverte... et énôôôôôôôôrme déception.

Retrouvailles avec le style si vivifiant de Gabriela Cabezón Cámara, son univers décapant et ses personnages si pleins d’humanité. 
Après Pleines de Grâce, il est encore question d’identité, de liberté et de vivre ensemble dans ces réjouissantes Aventures de China Iron, relecture queer et féministe de Martín Fierro, classique de la littérature argentine de José Hernández. (détail que j'ignorais quand j'ai lu le roman mais qui ne m'a nullement empêché de passer un excellent moment)
 
Avec Des milliers de lune, Sebastian Barry renoue avec le sud des États-Unis de la fin du XIXe siècle.
Si on retrouve Thomas McNulty et son acolyte John Cole dans cette suite de Des jours sans fin (qui peut s’apprécier sans qu’on ait lu le roman précédent), c’est leur « fille adoptive », Winona, jeune indienne Lakota, qui est le personnage central - et la narratrice - de ce beau roman sur l’identité, le racisme, la transmission, la mémoire, l’éveil à la sensualité et à l’amour.

Avec son embonpoint et ses manières parfois peu viriles, Gordo fait tâche dans la communauté machiste des familles d’ouvriers mexicains de cette petite ville de Californie des années 1970. Souvent moqué par ses camarades qui le tiennent à l’écart, Gordo a tout son temps pour observer le jeu des adultes... quand il ne fait pas les 400 coups avec sa cousine.
Vue à travers ses yeux de gamin de 10 ans, chacune des nouvelles de ce recueil est comme un instantané des « petits drames » du quotidien de ces exilés, en quête d’une vie meilleure. C’est tendre, drôle (avec la naïveté inhérente à son âge, Gordo ne saisit pas toujours la nature exacte de ce qui se joue sous ses yeux), aussi vif et impertinent que le jeune héros. Un vrai régal.

Une œuvre hors normes de près de 1100 pages, découpée en cinq volumes aux formes narratives variées (encyclopédie, récit, journal, manga, transcription de dictaphone), tous liés les uns aux autres mais pouvant se lire dans n’importe quel ordre, brassant les lieux et les époques, de la France de la Commune au Japon de Fukushima. Et ce titre !
Comment ne pas être tenté par Le grand rire des hommes assis au bord du monde ?
 
 Paulette Blanchard - Encyclopédies d'un Moi (sous la direction de Louis de Neufville) [300 pages]
Jona Jonas - Terrain vague. Récit [164 pages]
Chantal Blanchard - Cahiers - Septième Cahier (novembre 2010 à mars 2011) [315 pages]
Akio Ito - Les Carnets d'Akio (Transcription) [94 pages]
Ara Aoki - Les îles heureuses [184 pages]
 
J’ai commencé mon voyage dans cette odyssée par les Encyclopédies d'un Moi, de Paulette Blanchard, jeune française qui s’affranchit du carcan de son milieu bourgeois de la fin du XIXe siècle, et sera l'une des premières Européennes à pénétrer dans ce pays hermétique qu’est le Japon de cette époque. Peut-être est-ce dû à la structure du récit, sous forme d’entrées encyclopédiques, mais je suis resté simple spectateur de l’émancipation de cette femme au destin hors du commun, qui manque cruellement de chair.
Toujours curieux, j’ai poursuivi avec l’histoire de Jona, trentenaire français à la recherche de son amour perdu à Tokyo, lors du tremblement de terre de 2011. Pas inintéressant, mais à peine plus prenant que le premier volume.
Les Cahiers de Chantal Blanchard, descendante de l’héroïne du premier volume et spécialiste du climat, consignent ses états d’âme sur sa relation avec un homme plus jeune qu’elle (Jona) et donnent à lire d'interminables exposés sur la théorie de l’évolution et autres questionnements pseudo-philosophiques. Chiant comme un manuel scolaire, les quelques jeux typographiques qui parsèment le texte n'ont pas suffi à sauver l'affaire et je me suis vu « zapper » de plus en plus souvent pour enfin refermer ce volume.
Akio, jeune rescapé du tsunami de Fukushima, réfugié avec des dizaines d’autres personnes dans un gymnase, confie sa mésaventure à un dictaphone. Bof... Faire son narrateur d'un enfant de 6 ans 'est pas sans risque; mais au moins j’ai lu ce volume en intégralité.
En revanche, je ne suis pas allé plus loin que quelques pages du manga Ara Aoki. Passant outre le dessin que je trouve horrible, j’ai essayé pendant quelques pages de suivre l'action sans rien y comprendre... si bien que j’ai jeté l’éponge.
 
Bref, ce qui a été présenté comme « l’événement littéraire de la rentrée » s’est avéré n’être finalement pour moi qu’un pétard mouillé. 
Excepté le post (enflammé) de Cyril sur son compte IG, je n’ai pas trouvé trace de recension de ce roman sur les blogs. En revanche, la presse en a beaucoup parlé, et généralement de façon élogieuse et enthousiaste. Seul En Attendant Nadeau exprime efficacement ce que j'ai pensé de ce phénomène éditorial :
« Comme dans un roman de Jules Verne, ce devrait être palpitant, mais tout se réduit en fait à une accumulation de fiches documentées, sans aucune vibration parce que l’essentiel manque : des personnages capables d’incarner un fouillis d’idées généralement justes. Hélas ! donc c’est ennuyeux comme la pluie. » 
Vous qui passez par-ici, si vous l'avez lu, je serais vraiment très curieux de savoir ce que vous en avez pensé et les raisons pour lesquelles vous avez aimé ou détesté.

Commentaires

  1. Le grand rire des hommes..; rien que le titre, ça me va!

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    1. Malheureusement, c'est loin de suffire...
      Et une fois le roman refermé, j'avais la sensation qu'il s'agissait plutôt du Grand rire de l'auteur assis au bord de mon épaule, ravi de sa duperie.

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  2. Jamais entendu parler du Grand rire des hommes... ou alors la mention des 1100 pages m'a fait zapper (ça m'arrive). Bref, je continuerai de l'ignorer, et tout ira bien !
    Par contre, j'ai lu récemment un avis sur China Iron et j'étais très intriguée, et là, je l'ajoute tout de suite à ma liste !
    Cela fait un ensemble de belles lectures, tout de même ?

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    1. Plus de 1 000 pages réparties en 5 volumes d'inégale longueur, ça me semblait tout à fait jouable (et ça l'est, en fait, même si j'ai fait l'impasse sur le manga et le 4e quart de l'un des textes).
      Si tu ressors enthousiaste de ta future lecture desAventures de China Iron, n'hésite pas à poursuivre avec Pleines de grâce qui, à mon avis, est encore meilleur.

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  3. Jolie sélection dont je n''ai lu aucun ouvrage.

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    1. Ça ne m'étonne pas vraiment, même si dans le lot Des milliers de lunes aurait pu te plaire.

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    2. Oui tu as raison, tu connais bien ems goûts en matière de lecture. Je serais certainement en terrain connu avec Des milliers de lunes (une sorte de mixte entre l'univers de Jesmyn Ward et les livres Betty et Lucy and the sky)

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  4. Je me méfiais un peu de l'enthousiasme, tout éditorial, me semble-t-il autour de Le grand rires des hommes, ce que tu en dis etle commentaire que tu cites de En attendant Nadeau me confirment que je ne me lancerai pas dans cette Odyssée, et pourtant l'aventure hors norme me tentait (mais bon, un peu par snobisme, je dois l'avouer). Les aventure de China Iron, par contre me tentent plutôt et aussi la suite Des jours sans fin, roman qui m'avait enchantée.
    Merci pour ces deux conseils et ce non conseil !

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    1. Snobisme ou pas, si l'envie n'est pas là, ne perds pas ton temps et choisis plutôt de t'embarquer dans une histoire qui te tente. Même si je l'ai trouvé moins émouvant que Des jours sans fin, Des milliers de lunes devrait te ravir.

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  5. Voilà, merci. Figure toi que je ne m'en souvenais pas (et pourtant, la preuve, mon commentaire plus haut). Exact, on ne trouve pas ce bouquin sur les blogs, et c'est quand même dommage. Exact, ç'aurait pu être plus passionnant en coupant pas mal de trucs dans le Journal et en zappant le manga, mais globalement je ne regrette pas ma découverte. Au moins, ça change e l'ordinaire.

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    1. On est d'accord sur l'ensemble. Quant à la décision de certaines bibliothèques de désolidariser les 5 parties de ce livre, je trouve que c'est tout simplement une aberration qui dénature l’œuvre.

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