Bains de mer, Paul Morand
En mai dernier, Robert Laffont rééditait Bains de mer, bains de rêve et autres voyages, une collection de textes de voyages écrits par Paul Morand. Le titre et la jolie photo vintage de la couverture m’ont soudain donné envie de vagues et d’air iodé, comme un avant-goût de vacances.
Ne connaissant pas Morand autrement que de nom, j’ai préféré jouer la sécurité plutôt que de me précipiter sur ce pavé de presque 1100 pages (1/2 kilo, la bête !). Je me suis donc rabattu sur une ancienne édition plus light, parue en 1992 dans la collection Biblio du Livre de Poche, Bains de mer.
Pour celles et ceux qui n’auraient qu’une vague idée de qui était l’auteur, comme moi en commençant ma lecture, il suffit de savoir que Paul Morand, diplomate et académicien français, est mort en 1976 à l’âge de 88 ans. (Pour apprécier ce texte, mieux vaut ne rien savoir de ses relations avec le régime de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale, ni de son antisémitisme et de son homophobie.)
Dans Bains de mer, il égrène les souvenirs de baignades qu’il a faites à travers toute l’Europe, passant en revue les pays les uns après les autres, commençant par les pays méditerranéens pour finir par le nord de l’Europe.
Ce chapelet d’évocations nostalgiques, d’impressions et d’opinions toutes personnelles pourrait finir par lasser si ce n’était l’élégance stylistique dont fait preuve leur auteur, tout particulièrement dans la première partie de l’ouvrage, intitulée Bains de Poésie.
Ce qui participe aussi au charme de ces souvenirs, c’est l’époque à laquelle ils sont attachés. À 72 ans, Morand passe en revue les escapades qu’il a faites au début du XXe siècle. En ces temps, vacances et voyages étaient l’apanage d’une élite sociale. Et si voyager était une véritable aventure, celle-ci se vivait dans le luxe de paquebots comme le France ou de trains légendaires comme l’Orient Express. Le tourisme de masse, que déplore déjà Morand dans la dernière partie de ce livre écrit en 1960, L’Eldorado existe-t-il ?, n’avait pas encore défiguré le monde.
Il en est des voyages comme des rêves : ils en disent long sur leurs auteurs. S’il a été un grand voyageur de son temps, dès qu’il s’agit d’aller faire trempette, Paul Morand préfère la villégiature. Si bien qu’il ne nous dit pas grand-chose des endroits où il se trouve, sinon, de temps à autre, quelques propos peu amènes, pour ne pas dire réac, notamment sur les autochtones.
Ce sera là ma seule réticence sur la douce nostalgie de ces baignades d’antan dans des eaux pures, au large de côtes quasi désertes.
Bains de mer - Extraits
Paul Morand - Bains de mer (Livre de Poche Biblio, 1992) [1960]
J'aime les bains de mer et les voyages mais ce que tu me dis de l'auteur me refroidit complètement... (et pourtant les baignades dans l'eau froide, ça me connait, habitant le nord du Finistère).
RépondreSupprimerJe me suis posé la question, en rédigeant le billet, s'il était nécessaire de préciser ces éléments de la bio de l'auteur. Si je l'ai fait, c'est par souci de transparence mais je suis quasi certain que si je l'avais su avant ma lecture, je n'aurais même pas ouvert le livre.
SupprimerIl n'empêche que c'est très bien écrit (il n'y a qu'à se reporter aux extraits pour s'en convaincre) et qu'à part quelques remarques du type de celle sur les Corses, rien ne transpire de ses idées.
Paul Morand, voilà qui ne nous rajeunit pas. Je ne l'ai jamais lu, (il sentait le soufre dans ma jeunesse) mais j'ai beaucoup entendu parler de son style.
RépondreSupprimerEffectivement, ça ne date pas d'hier, et c'est ce qui m'a aussi motivé ma lecture au départ. S'il sent toujours le soufre aujourd'hui, on ne t'a pas menti sur la qualité de sa plume.
Supprimerje ne connaissais que de nom et pour ses idées politiques, du coup difficile de mettre cela de côté surtout lorsqu'il met en avant les voyages mais pour ensuite, si je comprends, aimer les lieux mais pas leurs habitants... pas trop tentée !
RépondreSupprimerTu es plus cultivée que moi, qui ne le "connaissais" que de nom et pas même de (mauvaise) réputation.
SupprimerC'est vrai qu'une fois qu'on connaît mieux le bonhomme, on a bien moins envie de lire sa prose... et pourtant, ces baignades sont délicieusement décrites.
C'est l'éternelle question : doit-on/peut-on séparer l'artiste de son œuvre ? De même, peut-on considérer Voyage au bout de la nuit comme l'un des meilleurs livres qu'on ait jamais lus sans partagent pour autant les idées antisémites de Céline ?
J'ai apprécié de lire ces textes en toute innocence, car je ne les aurais pas lus autrement. J'ai été aussi rassuré de constater que les quelques rares passages qui m'ont fait tiquer n'étaient pas uniquement de mon fait, mais qu'ils avaient bien leurs racines dans un terreau putride.
En effet, il vaut mieux ne rien savoir. Mais comme je savais déjà...
RépondreSupprimerLe cerveau n'a malheureusement pas de touche Delete... du moins, pas une que l'on peut activer à sa guise, quand on le souhaite ;)
SupprimerPas du tout tentée, pour une fois. Ça sonne beaucoup trop bucolique à mon goût!
RépondreSupprimerC'est surtout très... marin :D
SupprimerMais je comprends aisément que ça ne semble pas très tentant. C'est toujours ça de gagné pour ta PàL ;)
Pas évident de lire cet auteur, et pourtant le thème et tes extraits me plaisent beaucoup
RépondreSupprimerC'est là tout le dilemme de cette lecture. L'écriture est très belle. L'auteur, beaucoup moins.
SupprimerMouais... le personnage me répugne tellement que ça ne m'intéresse pas du tout.
RépondreSupprimerComment se fait-il que ça ne m'étonne pas ? ;D
SupprimerTiens, à cause de toi (ou grâce à, on verra), ce midi je suis allé acheter Mon père des montagnes !
J'ai cette édition dans ma bibliothèque depuis au moins 20 ans, et je ne l'ai jamais lue !
RépondreSupprimerIl n'y aurait pas eu ce post sur la nouvelle édition publiée par Robert Laffont (et surtout sa superbe photo vintage), je n'aurais jamais eu l'idée de lire ce livre. En plus, il faut avouer que la couverture de notre édition n'invite pas vraiment au rêve.... enfin, je trouve.
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