Récap de novembre 2021


Sylvain Tesson - La Panthère des neiges (Gallimard, 2019)
Françoise Sagan - Derrière l'épaule (Stock, 2021) [1998]
Antoine Dole - Six pieds sur terre (Robert Laffont, 2021)
Colson Whitehead - Harlem Shuffle (Doubleday, 2021)
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Un mois de novembre sur les chapeaux de roues.
Entre le boulot et le chéri, invalide pour cause de double fracture du pied*, je n’ai fait que courir après le temps. Pas une minute à moi, ou presque, et donc peu de temps – et d’énergie – pour lire.
* ça paraît pas, mais avec interdiction de prendre appui sur le pied - et donc les mains occupées pendant 45 jours par les béquilles - pas facile de faire quoi que ce soit d'autre (mais un charmant tote bag autour du cou peut rendre de précieux services 😜).


Comme je l’ai déjà expliqué plus tôt dans les commentaires, j’ai mis plusieurs mois avant de me décider à ouvrir La Panthère des neiges que je n’aurais pas lu si on ne me l’avait offert. Cela m’a également demandé un certain temps pour m’installer dans ce roman (cf. ces mêmes commentaires)
Heureusement, la seconde partie, concentrée sur l'affût et l’attente, m’a captivé, et a sauvé tout ce qui précédait.
Bénéfice collatéral de ce cadeau inattendu : j’ai découvert le travail et les superbes photos de Vincent Munier.
 

 
Quel plaisir de retrouver l’élégance intemporelle de Sagan. En cas de coup de mou, l'art de la formule de cet esprit libre, trop lucide pour être totalement désinvolte, ne manque jamais de me redonner la pèche.
Passage en revue du grand œuvre par l’autrice elle-même, Derrière l’épaule est un petit bijou d’ironie et de désenchantement, à la fois drôle et émouvant. Un plaisir savoureux que je prolonge ces jours-ci en picorant de ci, de là, dans le recueil Aphorismes & pensées, tout récemment publié chez Julliard.

 
D’Antoine Dole, je n’avais lu que Météore
J’ai retrouvé dans Six pieds sur terre, son « premier roman pour adultes », comme il est généralement présenté dans les médias, des personnages cabossés par la vie, dont l’existence est une lutte de tous les instants. Un texte fulgurant, à fleur de peau, où s’entrechoquent et se percutent la généreuse Camille et l'inconsolable Jérémy, couple singulier au bord de l'implosion. 
Personnage lumineux et émouvant comme j'en ai rarement croisé, Camille est inébranlable dans sa foi en l'autre et opiniâtre face aux obstacles qui contrarient la mission dont on l'a investie depuis toujours : recoller les morceaux.



Back to Whitehead.
Me revoici donc à nouveau en compagnie de l’auteur doublement "Pulitzerisé" qui s’essaye cette fois-ci à la littérature de genre, en l’occurrence le roman noir de gangsters. Propriétaire d'un magasin d'ameublement, Ray Carney mène une vie rangée, à l'opposé de celle de son truand de père. Jusqu'au jour où, mêlé à son corps défendant aux louches affaires de son cousin, il va se retrouver à devoir louvoyer entre deux mondes, à essayer de concilier sa vie de famille et l'univers interlope du grand banditisme.
Ce qui est intéressant dans Harlem Shuffle, c’est toute la reconstitution du Harlem du début des années 1960, troublé par les mouvements sociaux, les émeutes et la violence. Toutes les références culturelles et politiques de cette époque qu’y glisse Colson Whitehead rendent son évocation puissante et vivante. Ce sont aussi tous les parallèles qu’on peut faire avec l'état de la société américaine d’aujourd’hui.
Seulement, comme déjà dans Underground Railway, de nombreuses digressions sans réel intérêt pour l’intrigue ralentissent la narration, si bien que je m’y suis ennuyé à plusieurs (longues) reprises.
 

Commentaires

  1. Ma bibliothécaire a acheté le bouquin sur Bascoulard et me l'a prêté, avant même de le lire elle-même. Sympa, non?

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    1. Super sympa, même. Du coup, j'ai hâte de savoir ce que tu vas penser du roman...

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    2. J'étais pressée de lui rendre, pas de billet, mais j'ai aimé comment l'auteur a présenté Bascoulard.

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  2. J'ai le Colson dont j'ai déjà entendu quelques commentaires à son sujet, on verra bien ! ah oui les fractures du pied, c'est comme les opérations du poignet, c'est très ch.... en attendant, tu as quand même lu même Sagan que je n'ai toujours pas lu

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    1. Pour la fracture, les choses s'arrangent un peu : on est passé des béquilles à la botte de marche, façon Robocop (ou chaussure de ski, au choix). Les mains sont (enfin !) libérées (délivrééééééées) et la bête en cage a gagné un peu en autonomie 😊.
      Le Sagan vaut vraiment pour ce regard sans concession, ni fausse modestie qu'elle porte sur son œuvre et sur les différents événements qui ont accompagné les différentes parutions.

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  3. Très envie de découvrir le Antoine Dole.

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    1. Si ça avait été une version papier, je me serais fait un plaisir de te l'envoyer pour partager cette lecture avec toi.

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  4. Tu avais raison : tu manques trop d'enthousiasme pour me donner envie de m'attaquer au dernier Whitehead... et je compatis pour l'accidenté, ayant eu récemment le bras immobilisé pendant 6 semaines (je me suis d'ailleurs estimé chanceuse que ce ne soit pas la jambe...). J'espère que cela va mieux et que vous abordez cette fin d'année plus tranquillement...

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    1. D'autres que moi, quand le livre paraitra chez nous, te donneront peut-être plus envie que moi de faire un voyage dans le temps et de te plonger dans Harlem Shuffle.

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  5. Bon rétablissement à ton conjoint. Je note l'astuce du tote bag au cas où ;)

    Les livres de Colson Whitehead sont très intéressants sur le papier, mais j'ai l'impression qu'il est un peu surestimé (j'ai apprécié "Nickel Boys" sur le coup, mais il ne m'en reste pas grand chose).

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    1. Merci pour lui ! Inutile de te dire qu'il est impatient de retrouver au plus vite toute sa mobilité. 😜
      Whitehead est un bon auteur dont j'apprécie le style et les sujets (tout au moins de ses trois derniers romans en date qui sont les seuls que j'ai lus). Mais je trouve qu'il est beaucoup plus efficace et percutant quand il ne s'encombre pas de détail et qu'il se cantonne à l'essentiel, comme dans Nickel Boys qui est celui que j'ai préféré (de loin) et qui m'a le plus marqué.

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  6. J'ignorais la publication de ce livre de Françoise Sagan. J'ai toujours eu beaucoup de tendresse pour cet écrivain.

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    1. Publié originellement chez Julliard en 1998, cet essai vient de reparaître chez Stock, grâce à l'obstination du fils de Sagan, Denis Westhoff, qui travaille d'arrache-pied à faire vivre l’œuvre de sa mère.
      C'est un ouvrage très intéressant pour qui aime Sagan.

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  7. Vive les tote bag 😜!
    J'ai lu le Sagan récemment. J'en parle aujourd'hui. Quelle belle entrée en matière pour aborder son oeuvre.
    Le Dole pour adultes m'intéresse fortement. Quant au Whitehead, je vais sagement attendre sa traduction. Je suis moins exigeante envers lui, mais je lui reste fidèle!

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    1. Le tote bag en musette autour du cou donne un petit côté Saint-Bernard, très choupinou et attendrissant 😈
      Tu as tapé juste pour ta première rencontre avec Sagan. De nombreuses autres t'attendent désormais.
      Le Dole n'est pas tout rose (on s'en serait douté) mais il y a de très belles choses dedans.
      Quant au Whitehead, si tu as aimé les deux précédents - et a fortiori Underground Railway, je serais bien étonné que celui-ci ne t'emporte pas.

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  8. le roman d'antoine Dole me fait de l'oeil ! je ne l'avais pas vu passer celui-ci. merci bien m'ssieur !

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    1. De rien, très cher 😉. Et si jamais tu ne l'avais pas vu passer non plus, voici un lien vers le replay de l'émission Une Journée Particulière (France Inter) de dimanche dernier, dont Antoine Dole était l'invité, et que j'ai trouvée instructive.

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  9. Merci de mettre en lumière la plume sensationnelle de Sagan. Je n'ai qu'une envie : la relire.

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    1. Sagan est indémodable. J'ai même le sentiment que plus les années passent, plus sa modernité saute aux yeux.

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  10. Ah mais voilà, tu t'es quand même un peu ennuyé à plusieurs reprises.^^ En fait, c'est peut-être de ça dont, je parle, mais je ne l'ai pas ressenti pour Underground Railroad. Dans Harlem Shuffle, bien qu'il y ait 3 sortes de novellas, il y a un fil rouge, qui nous a bien accroché au départ, mais Colson digresse tant qu'on finit par se désintéresser de ce qui se passe ou s'y perdre un peu.

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    1. C'est intéressant de constater qu'en fait, je n'ai gardé à l'esprit que tout ce qui a fait que j'avais aimé cette plongée dans le Harlem des années 60 et que j'ai zappé le fait que toutes ces fameuses longueurs m'avaient à ce point gêné...
      Je crois que c'est pour cela que Nickel Boys, beaucoup plus direct et concis, reste à ce jour mon roman préféré de Colson Whitehead (ce que justement de nombreux-ses lecteur.ice.s lui ont reproché).

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